Plop

(private joke)

Il se passait quelque chose d'anormal, tout à coup. Il avait beau appuyer sur la commande d'ouverture, le portail restait obstinément fermé. Mais ce n'était pas tout. Le chien de l'autre coté de la rue était figé, comme une statue. Il sortit de sa voiture pour en avoir le coeur net.

En se levant il laissa tomber sa pipe, dont la chute s'arrêta net à vingt centimètres du sol. Dans le jardin, son chat fixait un oiseau lui aussi figé en plein vol. Le chat bougeait encore, mais ses mouvements étaient de plus en plus lents. Puis il comprit d'où venait cette impression diffuse de malaise: le soleil était en train de décliner, c'était net. Il était midi, et on se croyait maintenant presque au crépuscule.

La panique le gagnait. Autour de lui, quasiment plus rien ne bougeait. Lui-même commençait à se sentir engourdi.

Le chien avait disparu. S'était-il enfui? Lorsqu'il vit le cerisier du voisin s'estomper, puis disparaitre sous ses yeux, il sut que le chien ne s'était pas enfui.

Sa voiture n'était plus là. Le chat, puis l'oiseau disparurent à leur tour. La luminosité était devenu très faible, et le soleil une pale boule rougeâtre. Pourtant il ne faisait pas froid. Ou alors il ne sentait pas le froid. D'ailleurs il ne sentait plus grand chose. Il regarda vers le bas. Sous lui il n'y avait que du vide, et plus de route.

Les ténèbres l'enveloppèrent. Il lui sembla avoir eu le temps d'apercevoir sa main s'effacer. Avant de cesser d'exister tout à fait, il eut aussi le temps d'entendre une voix très lointaine: "Attention, j'ai rebooté chagall!"